Projet NucTerritory

Projet NucTerritory : objectiver les territorialités nucléaires

Le projet NucTerritory : objectiver les territorialités nucléaires est coordonné par Teva Meyer, maître de conférences en géographie au Centre de Recherches sur les Économies, les Sociétés, les Arts et les Techniques (CRESAT – UR 3436) de l’Université de Haute-Alsace, et financé par l’Agence Nationale de la Recherche (2021-2024).

 

Contexte

Logo - Agence Nationale de la Recherche

Le Power Reactor Information System de l’AIEA dénombrait au total 47 centrales nucléaires commerciales définitivement fermées dans 14 pays au début du mois de mars 2020. D’autres arrêts sont déjà prévus en Allemagne, en Suède, en Suisse, à Taïwan, en Corée du Sud, aux États-Unis et en Belgique. En France, le projet de programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) prévoit la fermeture de 14 tranches d’ici à 2035.

Simultanément, en octobre 2020, 409 réacteurs commerciaux étaient en fonction dans 31 pays, produisant 10,15% de l’électricité mondiale. Les projections de l’Agence Internationale à l’Énergie Atomique envisagent deux scénarii : le premier table sur une baisse de la capacité mondiale de production à 350 GW(e) jusqu’en 2050, le second projette une augmentation jusqu’à 874 GW(e). La quasi-totalité des nouvelles constructions de centrale planifiées se trouve en Asie (Chine, Inde, Corée du Sud, Pakistan) ou au Moyen-Orient (Turquie, EAU).

 

Objectifs

Les difficultés rencontrées par l’État français dans l’application de mesures d’accompagnement pour la reconversion de la centrale de Fessenheim témoignent du manque de connaissances dont nous disposons des « territoires nucléaires ».

Qu’il faille penser le démantèlement des réacteurs et la reconversion de leur territoire après la fermeture, ou que de nouvelles centrales soient en construction, le nucléaire continuera de faire partie des politiques énergétiques futures et de marquer les territoires de son empreinte pour les décennies prochaines.

Le renforcement de notre compréhension de la géographie du nucléaire constitue alors un enjeu crucial pour le bon déroulement des transitions énergétiques à venir, quel que soit la place qui sera accordée à cette source.

L’objectif du programme NucTerritory est alors de réfléchir aux relations entre les centrales nucléaires et l’espace.

Deux objectifs scientifiques et sociaux

Le but du projet est de renforcer nos connaissances de la géographie du nucléaire en dehors des approches basées sur l’étude des risques et de leur perception.  Pour ce faire, NucTerritory propose de mobiliser la notion de territorialité relationnelle afin d’évaluer l’ancrage spatial (spatial-embeddedness) des centrales nucléaires.

Tandis qu’un nombre croissant de centrales nucléaires seront fermées dans les prochaines années, le projet NucTerritory vise à produire et disséminer l’expertise nécessaire pour assurer des transitions territoriales sereines. Le but est de produire une information à destination tant des décideurs politiques et élus que du grand public amené à être consulté à l’avenir sur ces enjeux.

Approches développées pour y répondre

  • Une approche interdisciplinaire convoquant des géographes, des historiens et des juristes
  • Une double approche comparative, en étudiant simultanément quatre centrales nucléaires situées sur des terrains différents et à des stades opposés de leur vie opérationnelle afin d’identifier les variables responsables des différences entre les territorialités.

Les études de cas seront réalisées dans :

Carte de situation - Royaume-Uni

Deux centrales nucléaires au Royaume-Uni : Wylfa, fermée en 2015 et Heysham, toujours en activité

Carte de situation - États-Unis

Deux autres sur la côte est des États-Unis : Vermont Yankee, fermée en 2014 et Seabrook, toujours en activité

 

Question de recherche – Hypothèses

La question de recherche principale de NucTerritory est d’évaluer la manière dont les relations entre l’espace et le nucléaire créent des territoires.

Schéma d'hypothèse

Méta-hypothèse

  • La méta-hypothèse du projet est que les centrales nucléaires interagissent avec l’espace en créant des territorialités à différentes échelles. Cette proposition se divise en deux sous-hypothèses.

Première sous hypothèse : Territorialités – territoires

  • La profusion de concept, “paysage nucléaire”, “friche nucléaire” ou “communauté nucléaire”, démontre les difficultés qui existent dans la définition des relations entre l’espace et l’industrie nucléaire.
  • Dans ce projet, nous posons l’hypothèse que, pour surmonter ces difficultés, l’intérêt de doit pas se porter sur les territoires, mais plutôt sur les territorialités.
  • Considérer les relations entre les centrales et l’espace comme un processus en recomposition et non comme une réalité statique permet d’embrasser leurs natures changeantes, ainsi que leur multidimensionnalité.

Deuxième sous hypothèse : Exceptionnalité – banalité

  • Les travaux de Gabrielle Hecht ont montré que les choses touchant au domaine du nucléaire ont été socialement et politiquement construites comme radicalement exceptionnelles.
  • Développer une approche critique face à cet “exceptionnalisme nucléaire” demande de s’intéresser plus spécifiquement aux éléments constituant la banalité quotidienne des technologies nucléaires.
  • Dans ce projet, nous posons l’hypothèse que, pour documenter l’existence de territorialités nucléaires, il est nécessaire de regarder sérieusement la banalité des relations entre l’espace et les centrales.

La comparaison comme hypothèse de recherche

  • Les recherches en sciences humaines et sociales sur le nucléaire ont privilégié des approches monographiques, n’offrant que peu de comparaison permettant de documenter la construction des territorialités nucléaires.
  • Considérant que la nucléarité change dans le temps et l’espace, NucTerritory considère que, pour comprendre comment se développent les territorialités nucléaires et identifier leurs éléments constitutifs, il est nécessaire d’adopter une démarche comparative en étudiant des contextes temporels et spatiaux différents.